D’année en année, le budget de l’État consacré à l’enseignement supérieur et à la recherche diminue. 2025 ne fait pas exception, entre absence d’augmentation des dotations et non compensations de diverses dépenses imposées par ailleurs. Mais devant l’ampleur des sommes concernées cette année dans les budgets des établissements du supérieur, la voix des président·es d’université s’élève, en plus de celle des organisations syndicales qui elles, depuis des années, réclament des moyens à la hauteur des besoins.
Universités en danger !
Tel est le cri des présidentes et présidents d’université poussé le 3 décembre suite aux annonces budgétaires pour l’année 2025. Et pour cette mobilisation inédite, certains établissements sont allés jusqu’à fermer totalement leurs portes, « comme un jour férié en semaine » (Université de Lille) quand d’autres ont suspendu tous leurs enseignements (Université Côte d’Azur, université de Reims Champagne-Ardenne, Avignon Université par exemple) ou ont convoqué des AG des personnels (Université Clermont Auvergne, Université Rennes 2). C’est la majeure partie des présidences des établissements qui se sont prononcées via communiqués de presse en soutien à cette initiative lancée par France Université (FU), l’association des président·es des établissements du supérieur. Un premier rassemblement de présidences d’universités (non déclaré aux autorités) avait eu lieu le 21 novembre dernier, devant le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche à Paris pour dénoncer la « situation financière intenable » des établissements.
60 universités sur 75 seront en déficit fin 2024
Pour 2025, le projet de loi de finances prévoit une très légère augmentation de la dotation des établissements (la « subvention pour charge de service public »). Mais, ce que disent les président·tes d’université c’est qu’elle est très insuffisante, pour plusieurs raisons. Ainsi, elle ne prend pas en compte cette année encore la compensation financière intégrale de divers coûts, ou plutôt surcoûts, décidés ailleurs. C’est par exemple le cas des mesures salariales (du reste insuffisantes pour les personnels) appliquées à la fonction publique (augmentation de la valeur du point, rehaussement de 5 points des grilles en janvier 2024 par exemple). Le glissement vieillesse technicité (l’augmentation structurelle du coût de la masse salariale) n’a jamais été compensé. L’envolée des coûts de l’énergie a enfin durement grevé les finances des établissements, avec des factures qui ont augmenté de façon exponentielle depuis 2021. Nouveauté 2025, le ministère prévoit une augmentation conséquente des prélèvements des cotisations pour la pension civile (le CAS « pensions »), pour une somme cumulée de plusieurs millions d’euros.
Résultat des courses, après un budget initial de 2024 à la baisse et une annulation de crédits en février 2024, les universités se sont retrouvées en difficulté financière et ont dû piocher dans leurs réserves pour boucler leur année. Et pour 2025, 60 des 75 universités ont annoncé l’adoption de budgets initiaux en déficit, pour pouvoir honorer leurs missions de service public.
Et après ?
Selon les règles budgétaires en vigueur, le risque est grand que les tutelles des établissements (les recteurs) reprennent la main sur la question et imposent aux établissements des mesures drastiques de retour à l’équilibre. Les président·es listent déjà leurs craintes sur des conséquences sur l’offre de formation, les capacités d’accueil sur Parcoursup, les investissements de rénovation des bâtiments, les gels de postes. Pour ce qui nous concerne, c’est évidemment l’emploi BIATSS qui nous préoccupe, et notamment celui des plus fragiles, les personnels contractuel·les qui pourraient être les premières variables d’ajustement, au détriment de la situation individuelle des agents, mais aussi des conditions de travail de l’ensemble des personnels et de la qualité du service public. La convergence des luttes a ses limites : France Université n’a pas placé sa mobilisation en faveur des établissements du supérieur le même jour que la journée de mobilisation en défense de la fonction publique et de ses personnels. Néanmoins, ces deux démarches visent bien à défendre le service public et ses agents, en espérant que les revendications soient entendues, car, au moment de boucler ce numéro de Convergences, la censure vient d’être votée par le parlement, faisant chuter le gouvernement. C’est donc retour à la case départ concernant la discussion budgétaire.
Sommaire du Convergences N° 302 — Décembre 2024
- Edito du numéro 302 – Décembre 2024
- Informations générales
- Motion d’actualité adoptée à la CAN du SNASUB-FSU du 12-13 novembre 2024
- Budget 2025 : ce qui est (ou était ?) prévu pour la mission enseignement scolaire (MIES) par le gouvernement Barnier
- Budget des universités : 4 universités sur 5 en déficit
- Mutations interacadémiques pour la rentrée 2025
- Journée internationale contre les violences faites aux femmes
- Un budget d’austérité pour les plus fragiles dans les Pays de la Loire…
- Quand Éric Ciotti déraille
- Guillaume Kasbarian : la haine ordinaire du fonctionnaire
- Le 18 novembre, l’intersyndicale nationale Op@le reçue au ministère de l’Éducation nationale
- Échec de Pluriel 2024 et clap de fin pour le rapprochement des établissements lyonnais
- Les bibliothèques universitaires face à l’Acte II de l’autonomie
- Lu pour vous
- Canopé et le budget 2025 au Sénat