Coupables d’être malades !

Le 5 décembre dernier, les personnels de la fonction publique – et parmi elles et eux de très nombreux collègues administratifs et techniques ou des bibliothèques – se sont mobilisé·es contre les mesures brutales que voulaient infliger le ministre de l’époque, Guillaume Kasbarian. D’aucun·es auraient pu penser que la force de la grève et des manifestations et la censure infligée au gouvernement Barnier auraient découragé celui nommé sous l’égide du Premier ministre Bayrou de poursuivre dans cette voie. Et non !

Plus personne ne nie que la première raison de la difficulté à recruter dans la Fonction publique résulte d’une part de la non-reconnaissance du travail et de l’engagement quotidien des personnels, du décrochage de leur rémunération d’avec le coût de la vie, et d’autre part du fait des discours qui ponctuent le débat public pour dénigrer les fonctionnaires, quand ce n’est pas leurs missions, leur travail…

Austérité et mauvais coups !

Un esprit rationnel, sain et sans doute un peu naïf campé sur son sens de l’intérêt général, aurait pu penser qu’il fallait arrêter de prendre pour des variables d’ajustement budgétaire les conditions de travail, de rémunération et de vie des fonctionnaires. Ce serait faire fi de la volonté gouvernementale de rechercher toujours des marges de manœuvre pour, cette année, boucler un budget d’austérité, de surcroît aggraver par les dérapages de la politique de l’offre au profit des plus riches et des actionnaires menée depuis 2018.

C’est à cette aune que Bayrou et son ministre en charge de la fonction publique, Laurent Marcangeli, ont choisi de maintenir deux des mesures contestées massivement le 5 décembre. La première, c’est la non-reconduction de la GIPA pour l’année 2024. Celle-ci aurait été massivement versée et ses montants auraient été bien plus hauts que les années précédentes du fait de la crise inflationniste. La seconde, c’est la reprise d’une des deux mesures qui touchaient au maintien de la rémunération en cas d’arrêt maladie : celle qui ampute 10 % de la rémunération des collègues malades.

Punir les malades !

L’article 189 de la loi de finances pour 2025 remplace dans le statut général des fonctionnaires la garantie de percevoir l’intégralité de son traitement par un maintien de 90 % de celui-ci les trois premiers mois du congé maladie. Les indemnités seront elles aussi diminuées dans les mêmes proportions. Seuls le supplément familial de traitement (SFT) et l’indemnité de résidence sont maintenues intégralement.

Après quatre mois d’ancienneté, les contractuel·les bénéficiaient de dispositions analogues à celle des fonctionnaires pour les trois premiers mois. Elles et ils se voient, eux aussi, logés à la même enseigne. En effet, le gouvernement a poursuivi son œuvre en prenant le décret n°2025-197 du 27 février 2025 dont l’article 2 vient aussi réduire de 10 % la rémunération maintenue en congé maladie.

Enfin, et comme pour achever le travail, il n’a pas oublié les personnels de l’AEFE et leur a infligé les mêmes mesures au moyen du décret n°2025-198 publié le même jour.

Remarquons que si la mesure n’était prise que pour des raisons d’urgence budgétaire, pour enrayer un dérapage largement commenté, elle aurait été conçue comme temporaire. Ce n’est pas le cas ! Cela suffit à démontrer que ce qui revient à l’État employeur comme responsabilité d’assumer sa part de protection sociale obligatoire est une responsabilité dont le gouvernement veut se débarrasser. Il ne manquerait plus qu’il soit proposé de faire prendre cette perte de revenu par des contrats de protection sociale complémentaire… Ce serait faux car ceci reviendrait à transférer la charge de couvrir la garantie que représentent les 10 % de perte de rémunération sur les personnels eux-mêmes ! Hors de question !

Une mesure de désordre dans les paies !

Aujourd’hui, des applicatifs de paie, et notamment ceux de la Direction générale des Finances publiques qui assurent les paies des agent·es publics rémunérés directement sur le budget de l’État, ne permettent pas de faire varier le taux de la rémunération maintenue à 90 %. Les collègues malades vont donc être payés intégralement, générant ainsi des trop-perçus. À ce stade, il est annoncé que la régularisation est prévue pour juillet.

La nécessité de construire la mobilisation

Dès le 11 février, la FSU a revendiqué devant le ministre de la Fonction publique la nécessité d’une loi de Finances rectificative, abrogeant notamment cette amputation de 10 % de la rémunération en cas de maladie. Ce dernier contentieux social vient en effet s’ajouter à celui du recul de l’âge légal de départ. Deux raisons de ne rien abdiquer de nos revendications !

Feuilleter le numéro<< Revenir à En bref

>> Aller à Un point sur le rapprochement CGT-FSU
Cet article est la rubrique 3 sur 9 du Convergences N° 305 - Mars 2025